Gouverneurs militaires, limitations des rassemblements, perquisitions à toute heure… La décision du président Tshisekedi fait grincer des dents dans le pays.

C’est l’une des premières mesures prises par le gouvernement congolais nommé à la mi-avril pour tourner la page de la coalition entre le camp de l’actuel président Félix Tshisekedi et celui de son prédécesseur, Joseph Kabila. Pour tenter d’en finir avec les violences qui ravagent l’est de la République démocratique du Congo (RDC), un état de siège a été proclamé dans les régions du Nord-Kivu et de l’Ituri.

D’après les ordonnances présidentielles signées lundi 3 mai par le chef de l’Etat, ces deux provinces passeront, à compter du jeudi 6 mai, sous administration militaire pour une durée de trente jours, prolongeable par le Congrès. Leurs gouverneurs et vice-gouverneurs seront suspendus et remplacés par des gouverneurs militaires et vice-gouverneurs issus des rangs de la police. Les juridictions civiles vont également céder le pas à des cours militaires.

Le président Tshisekedi, qui s’est dit sensible au « cri de détresse » des populations de l’est du pays lors de son allocution télévisée lundi, espère, grâce à ce dispositif, rétablir un semblant de paix. Mais le pari est risqué. Les provinces orientales du pays sont en proie à l’insécurité depuis les deux guerres du Congo (de 1996 à 1997, puis de 1998 à 2003) et les groupes armés ont prospéré dans ces zones riches en ressources minières, frontalières de l’Ouganda, du Rwanda et du Burundi.

En 2020, le baromètre sécuritaire du Kivu n’en recensait pas moins de 122. Parmi eux, les ADF (Forces démocratiques alliées), un groupe islamiste qui sévit dans la région de Béni au Nord-Kivu et est accusé du massacre de plus de 1 000 civils depuis novembre 2019.

Un cycle sans fin de violences

Pour illustrer sa volonté de pacifier l’est, le président Félix Tshisekedi s’était engagé à l’automne à venir s’installer à Goma, la capitale du Nord-Kivu, une promesse restée lettre morte. Et malgré les annonces régulières des autorités sur les « offensives d’envergure » menées par l’armée congolaise, la situation a empiré ces dernières années. Désormais, les attaques visant les civils sont quasiment quotidiennes.

Face à ce cycle sans fin de violences, les manifestations ont repris début avril à Beni et Butembo pour demander l’aide du gouvernement et le départ de la Monusco, la force de l’ONU en RDC, régulièrement critiquée pour son inaction. Dans ce contexte, la décision d’instaurer l’état de siège est autant une réponse aux mécontents qu’un coup politique.

«C’était dans le programme du nouveau gouvernement, souligne un proche de la présidence. Il fallait un geste choc, pour marquer la rupture avec l’administration précédente.» AFP

 

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