
J’ai été très surpris ce soir par la sortie du Premier ministre Kassory Fofana devant la presse pour soutenir l’éventualité d’une nouvelle constitution pour la Guinée. Oui il est le chef du gouvernement guinéen et il exerce ses fonctions à la discrétion et au bon vouloir du président de la République. Mais comme je connais très bien les deux hommes pour les avoir cotoyés de longues années, il y avait quelque chose d’incrédule dans cette sortie de Kassory Fofana. Il y avait quelque chose qui sonnait faux non seulement dans la démarche et le contexte mais aussi dans les habitudes.
Kassory que je connais n’est pas l’homme à endosser un projet aussi destabilisateur pour la Guinée. C’est pourquoi je donne ma tête à couper que cette intervention du Premier ministre est l’oeuvre du seul et unique Alpha Condé. Je suis prêt à parier avec n’importe qui pour soutenir le fait que c’est Alpha Condé qui a mis en demeure tous les ministres de se prononcer oui ou non sur la possibilité de mettre en place une nouvelle constitution.
A commencer par le Premier ministre lui-même à qui il a intimé l’ordre de se présenter devant les médias pour relayer le soutien des ministres au projet d’une nouvelle constitution. Kassory dit qu’il a fait le tour de table et que tous les ministres auraient dit oui à la nouvelle constitution. Mais pourquoi bon sang aurait-il eu besoin de faire cela si l’ordre n’était pas venu d’en haut?
Ce qui est sûr, c’est que la démission du ministre de la Justice Cheick Sako a jété un pavé dans la mare et maintenant Alpha Condé veut avoir des garanties qu’il n’y aura pas d’autres ministres qui seraient tentés de suivre l’exemple de Sako. Surtout que le gouvernement français, à travers son ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, a exprimé sa profonde inquiétude.
L’opération médiatique donc visait non seulement à minimiser l’impact de la démission du ministre de la Justice mais aussi à rassurer les partenaires au développement, dont la France, puissance colonisatrice. Tous les ministres étaient donc obligés de passer sous le rouleau compresseur en disant oui à la nouvelle constitution. Quiconque aurait dit Non, aurait été démis de ses fonctions manu-military.
Le moment venu, il n’hésitera pas à jéter les mêmes en pature face à la vindicte populaire et en se disculpant totalement. Ainsi fonctionnent les autocrates! Je suis d’autant plus convaincu de ce que j’affirme parce que déjà en 2001, Kassory Fofana était opposé au projet suicidaire du président Lansana Conté de changer la constitution et briguer un troisième mandat. Pour Kassory Fofana, c’était le début de sa lente disgrâce au sein de l’équipe Conté qui, éventuellement, le conduira en exil vers les Etats-Unis. Et c’est ce qui va initier un léger rapprochement (déjà à l’époque) entre Kassory Fofana et Alpha Condé.
Bien que tous les deux soient aujourd’hui à la tête de l’Etat guinéen, va t-on me dire que Kassory Fofana est prêt à accorder à Alpha Condé ce qu’il a refusé hier à Lansana Conté, son bienfaiteur et mentor politique? J’en doute très fort!
Thierno Sadou Diallo
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