Le général Brice Oligui Nguema a été désigné à l’unanimité «président du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI)», a annoncé un porte-parole à la chaîne de télévision Gabon 24 dans la soirée du mercredi 30 août. Le général Brice Oligui Nguema «ordonne la reconnexion de la fibre optique et le rétablissement des signaux de chaînes radio-télévisées internationales (…). De plus, le président de la transition insiste sur la nécessité de maintenir le calme et la sérénité [et] prend l’engagement de préserver l’outil économique garant d’une prospérité sociale.»
Cette journée a été marquée par la confusion au Gabon où, à peine la victoire d’Ali Bongo Ondimba à la présidentielle du 26 août connue, des militaires sont intervenus sur la chaîne de télévision publique Gabon 24 pour annoncer l’annulation des élections et la dissolution des institutions. «Nous mettons fin au régime en place», ont affirmé un groupe d’une douzaine de militaires gabonais mercredi 30 août à l’aube, annonçant que «les frontières sont fermées».
Parmi ces militaires figuraient des membres de la garde républicaine (GR), la garde prétorienne de la présidence, reconnaissables à leurs bérets verts, ainsi que des soldats de l’armée régulière et des policiers. La déclaration a ensuite également été diffusée sur la télévision publique Gabon Première.
Après avoir constaté «une gouvernance irresponsable, imprévisible, qui se traduit par une dégradation continue de la cohésion sociale risquant de conduire le pays au chaos (…), nous avons décidé de défendre la paix en mettant fin au régime en place», a déclaré un militaire à la télévision, disant s’exprimer au nom d’un «Comité de transition et de restauration des institutions».
Le président Ali Bongo «en résidence surveillée»
Entouré de sa famille et de ses médecins, «le président Ali Bongo est gardé en résidence surveillée», selon un communiqué lu à la télévision d’Etat par les militaires du CTRI. L’un de ses fils a été arrêté, notamment pour «haute trahison», ont également annoncé les soldats. Le général Brice Oligui Nguema, chef de la GR et qui pourrait être le futur homme fort du pays, a été porté en triomphe, mercredi, par des centaines de militaires quelques heures après le coup d’Etat, aux cris de «Oligui président», dans des images retransmises par la télévision d’Etat.
Selon des journalistes de l’Agence France-Presse (AFP) présents sur place, des tirs d’armes automatiques ont été entendus pendant la déclaration des militaires dans la capitale gabonaise, Libreville. Internet a été rétabli dans le pays, après avoir été coupé pendant trois jours par le gouvernement, qui invoquait des risques de violences le jour des élections.
Dans une vidéo diffusée en début d’après-midi et dont on ignore l’heure de tournage, Ali Bongo est assis dans un fauteuil et dit être au palais présidentiel. Il appelle en anglais ses «amis» à «faire du bruit ». M. Bongo dit avoir été arrêté avec sa famille: «Mon fils [et conseiller Noureddin Bongo Valentin] est quelque part, ma femme, elle, est ailleurs. (…) Je ne sais pas ce qu’il se passe.»
Six autres jeunes membres de l’entourage professionnel d’Ali Bongo ont été arrêtés notamment pour «haute trahison», « détournements massifs de deniers publics» et «falsification de la signature» du chef de l’Etat, ont annoncé les militaires putschistes en fin de matinée.
Une élection très contestée
Au pouvoir depuis quatorze ans, le président Ali Bongo Ondimba venait tout juste d’être déclaré réélu, mercredi matin, pour un troisième mandat, avec 64,27 % des suffrages exprimés. Selon l’autorité nationale chargée des élections, M. Bongo avait battu, dans un scrutin à un seul tour, son principal rival, Albert Ondo Ossa, qui n’avait recueilli que 30,77 % des voix, ainsi que douze autres candidats, qui n’avaient récolté que des miettes. Le président du Centre gabonais des élections, Michel Stéphane Bonda, avait annoncé les résultats à l’antenne de la télévision d’Etat Gabon Première. Le taux de participation a été de 56,65 %.
Albert Ondo Ossa avait dénoncé des «fraudes orchestrées par le camp Bongo » deux heures avant la clôture du scrutin, samedi, et revendiquait alors déjà la victoire. Son camp a exhorté lundi M. Bongo à «organiser, sans effusion de sang, la passation du pouvoir» sur la base d’un comptage effectué selon lui par ses propres scrutateurs, mais sans produire de document à l’appui.
Les résultats officiels ont été égrenés en plein milieu de la nuit, à 3 heures (4 heures à Paris), sur la télévision d’Etat sans qu’aucune annonce de l’événement n’ait été faite préalablement. En plein couvre-feu donc, deux mesures décrétées par le gouvernement samedi avant la fermeture des bureaux de vote, afin de parer selon lui à la diffusion «de fausses nouvelles» et à d’éventuelles «violences». AFP
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